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L’été mil neuf cent quatre-vingt quinze tirait à sa fin. La
nature reprenait ses droits en haute montagne.
Il y avait quelques temps déjà que le reportage d’un ami
cyclotouriste décrivant la route des crêtes de l’Assietta
m’avait séduit. L’image de cette piste m’avait envoûté comme
jadis la « Lorelei » pour les bateliers du Rhin. Il y avait
de quoi. D’ailleurs, pour être franc, je ne connais pas un
chasseur de cols qui puisse rester indifférent à cet
itinéraire. En quelque cinquante bornes, ce parcours ne
totalise pas moins de onze cols au-delà de 2000 mètres
d’altitude. Une courte variante permet même de porter ce
total à treize. Un chiffre qui ne porte pas bonheur,
paraît-il !
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il serait peut-être
utile de situer le « Massif de l’Assietta ».
Un peu de géographie ne fait jamais de tort. C'est excellent
pour dépoussiérer les étages de la mémoire.
Situons le massif des Alpes. Non ! Ce n'est pas vrai ! Vous
avez un trou de mémoire. Alors, faites comme Poulidor, il a
appris sa géo par cœur en roulant ses "Tours de France".
C'est la méthode la plus efficace. Quant à la masse rocheuse
de l'Assietta, elle sépare la vallée de la Doire Ripaire
(Susa) de celle de Chisone dont la cité de Pinerolo fut, à
l’époque de la monarchie de droit absolu en France, une
place forte ou un verrou frontalier des Alpes piémontaises.
Cette crête montagneuse se dresse entre la métropole
italienne de Turin et Briançon, la sous-préfecture du
département des Hautes-Alpes. Cette petite cité montagnarde
doit ses lettres de noblesse à Vauban et au Tour de France.
Voilà, chers lecteurs, pour le décrassage de votre mémoire.
Avouez que je n'ai pas fait de l'excès de zèle dans mes
commentaires ! Cela eût pu être pire !
Quoi qu’il en soit, cette route des crêtes, qui est une
ancienne piste militaire, m’a réservé l’éventail complet des
sensations que peu de randonneurs découvrent au cours de
leurs pérégrinations. Cette piste m’a octroyé tantôt des
surprises flirtant avec les voluptés procurées par les
neiges éternelles de l’horizon, tantôt des déboires côtoyant
les affres de l’enfer.
Lac de Serre-Ponçon
Voilà, pour le décor. Le
moment est enfin venu d’entamer le récit.
Donc, un premier colchique pointait son nez dehors ! Un
prématuré, assurément ! Quant à moi, à l’inverse des
coureurs du Tour de France qui se voient gratifier d’une
étape de transition seulement après deux semaines de course,
je commençais par là. La première étape « Gap –
Argentière-La-Bessée » longeait le cours de la Durance et ne
comportait aucune difficulté majeure. Seul fait d’armes : je
m' offris l’ascension du col de Pousterle pour tuer le
temps. Ad honores. Si vous n'êtes pas chasseur de cols,
n'essayez pas de comprendre !
bruffaertsjo@skynet.be
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