|
Les derniers jours de septembre se mettent aux couleurs de
l’été indien.
¶¶…..¶
On ira où tu voudras, quand tu voudras
Et…………la la la…..……la………la.. …¶….¶¶
L’été indien, c’est bel et bien… mais où s’envoler au pied
levé ? Après réflexion, exit l’avion. Trop de temps perdu
en transfert quand on ne s’accorde que 5 jours de défonce.
D’où la question à dix francs ! Où le prendre ce pied ?
D’autant plus que cette réflexion n’est qu’un avant-goût de
perplexité ! En effet, il faut que le point de chute soit
situé à une distance raisonnable, que la région conjugue
patrimoine et relief où la plaine côtoie la montagne, que la
contrée soit un dépaysement total. Et encore faut-il se
trouver à loger ? Bref, la quadrature s’apparente davantage
à une question à cent francs !
Eh bien, non ! Rassurez-vous ! L’endroit existe bel et bien
et encore bien à proximité de Bruxelles. En
Rhénanie-Palatinat. Deux heures et demie de route et on est
sur place. Dans la vallée de la Moselle à Bernkastel-Kues.
Au cœur des vignobles !
Depuis longue date, la localité titillait ma curiosité de
cyclotouriste. Peut-être que Nicolas de Cues (Cusanus),
théologien et philosophe de la « La Docte Ignorance », m’ait
attiré en son fief sans que j’en fusse conscient. Allez
comprendre les lois de la cosmologie !
Quoi qu’il en soit, j’installe mes quartiers sur les
hauteurs du « Kueser Plateau » en face de la petite ville
touristique et haut lieu viticole.
Fidèle à mes principes, il est exclu que je détaille par le
menu les 350 km et les 3350m de dénivelée de ces quatre
jours d’escapade mosellane.
Cependant, avant d’en arriver à mes états d’âme, deux ou
trois précisions méritent d’être évoquées. Moselle est un
diminutif de « Meuse », ce qui tend à dire que les Romains
considéraient la Moselle comme un affluent de la Meuse ou,
du moins, un cours d’eau faisant partie du bassin mosan.
Par ailleurs, la Moselle, qui se la coule douce sur quelque
200 km, sépare le massif de l’Eifel de celui de l’Hunsrück.
Deux chaînes de montagne qui ressemblent comme deux gouttes
d’eau à nos Hautes Fagnes. Les sommets en bordure de
rivière dépassent rarement les 450m d’altitude. C’est à
dire qu’il faut se farcir un dénivelé de l’ordre de 350m
pour prendre des grands airs au sommet des coteaux. Des
raidillons de pure souche sur 4 à 5 bornes. Et trois « Bigs »
en compensation à la disette de cols. Dernière
particularité : Bernkastel-Kues se trouve blottie dans un
méandre de la moyenne Moselle mi-chemin environ entre les
villes de Trêves et de Coblence. Voilà ce qu’il en est pour
la localisation des lieux.
Avant tout, j’ai aimé
la tranquillité et la gracilité de la Moselle qui s’étire en
une douce caresse vers les eaux tumultueuses du Rhin.
Je me suis raffolé à
tournicoter, virevolter et sinuer entre les vignes opulentes
du bord de la rivière. Sur d’interminables pistes
cyclables en site propre. J’ai
pris mon pied en me hissant au sommet de
ces coteaux par les routes confidentielles réservées aux
vignerons. Je me suis passionné
pour le charme de Bernkastel-Kues, sa place du marché,
unique en son genre, avec ses maisons à colombage.
J’ai affectionné la
grimpette vers les ruines de son « Burg Landshut » et son
vaste panorama sur les vignobles du « Kueser Plateau », la
ville et la sinuosité de la Moselle. Dans la descente
vertigineuse sur Cochem, j’ai
contemplé son « Reichsburg », le château impérial
qui trône au-dessus de la cité. Peu après, ce sont les
manœuvres des bateaux-mouches qui
ont attiré mon attention.
J’ai dévoré
des yeux le merveilleux
site de Trittenheim où la Moselle se contorsionne comme un
serpent en un méandre parfait.
Je me suis régalé sur les pentes du Mont Royal
dont le coup de reins mérite le raccourci. Cette éminence,
qui rappelle le passage du Roi Soleil, contraint la Moselle
à décrire une boucle à peu de chose parfaite. Une
petite
contrariété : les bancs de brume et la
fraîcheur des matinées. J’ai
trouvé du plaisir à dévaler les larges lacets du
célèbre vignoble de l’Urziger Würzgarten.
J’ai redouté les
dangers du trafic dès que le cycliste emprunte une nationale
ou une voie de communication importante.
J’ai regretté les
travaux sur la Hunsrück-Höhenstrasse qui sont à l’origine du
détournement de la circulation sur les voies communales de
la région de Morbach. J’ai
savouré avec beaucoup de modération un grand cru
régional de Riesling. Il était magnifique mais pas
démocratique pour un sou. Aussi me
suis-je délecté
avec de la Bitburger Bier, moins chère mais excellente
néanmoins. J’ai goûté
le calme de « l’Amselnest », ma résidence sur le « Kueser
Plateau » qui est investi par les curistes de tous poils.
Par contre, j’en ai
appréhendé le final
de 10% à chaque retour de balade.
Je me suis félicité de
m’être aventuré sur la « Moselhöhenweg », une piste
forestière qui aboutit sur une vaste clairière, « le
Dreifaltigkeit », qui m’a tout l’air d’un lieu de sabbat.
Moins d’un kilomètre plus loin, la tour panoramique du « Greinskopf »,
perchée à 325 m d’altitude, m’a
procuré la joie d’une
vue quasi aérienne sur la vallée de la Moselle, les
contreforts de l’Hunsrück et les pâturages de l’Eifel.
J’ai apprécié la
quiétude de la piste cyclable de la « Mare-Mosel Radweg »
qui remonte le filet d’eau de la Lieser.
Comme tout lecteur peut le constater, le bilan est très
positif pour une escapade organisée au pied levé. La vallée
de la Moselle est un petit paradis cycliste. Cependant !
Si de très nombreux cyclistes sillonnent, hors saison, les
pistes de la vallée, on est en droit de se demander la foire
que cela doit être en pleine période estivale ? Une
consolation, toutefois ! Dès les premiers degrés dans les
coteaux, il n’y a plus un chat à voir ! Et de cyclistes
encore moins ! C’est vrai que ça monte sec ! C’est la
raison pour laquelle le BIG c’est à dire le Brevet
International du Grimpeur, cher à mon ami Daniel, a inscrit
deux ascensions dans le parc naturel de l’Hunsrück et une en
bordure de la Moselle. Cette dernière prend son origine
dans le village de Bremm situé entre Cochem et
Traben-Trarbach. Pas moyen de se tromper ! Il n’y a qu’à
suivre la pente ascendante. Dès la sortie de
l’agglomération, la route se fraie un large passage en lacet
entre les vignes. Degré de difficulté : un 10% constant
puisqu’il faut hisser son barda de 330 m sur quelque 3
kilomètres. L’ascension débouche sur un plateau où
l’agriculture reprend ses droits.
Mon sentiment : un BIG court et bien.
Le deuxième Big, « l’Erbeskopf », culmine à 818 m
d’altitude. C’est le sommet du massif montagneux de
l’Hunsrück. La Bundeswehr en a fait une zone militaire
dominée par une tour en forme de gland qui fait face à un
vétuste mirador en bois. Entre les deux une vaste plaine de
drill. En contrebas de ce mamelon herbeux, les autorités
civiles ont installé un parc de récréation en regard d’une
importante station de pompage d’eau potable. Avec des noirs
sapins tout autour.
L’handicap de ce Big, c’est qu’il faut obligatoirement se
farcir des routes à grande circulation pour y parvenir sauf
utilisation du GPS et emprunter les pistes forestières.
Mon sentiment : un satisfecit bien payé.
Quant au « Stumpfer Turm », je m’attendais à mieux. Ça
foire dès la sortie de Bernkastel-Kues, à hauteur du
cimetière. Une mise en route laborieuse à cause de la
circulation dense et de l’étroitesse du chemin. Un cluse,
quelques beaux lacets jusque Longkamp, ensuite rien de bien
exceptionnel si ce n’est le croisement permanent d’un train
de poids lourds détournés de la Hunsrück-Höhenstrasse. La
faute à pas de chance puisque c’est la route principale qui
traverse le massif montagneux sur toute sa longueur.
A force de me concentrer pour rester bien en ligne, de
contrebalancer illusoirement le déplacement d’air des
camions, de récupérer en catastrophe ma casquette, de râler,
je suis parvenu à 100 m du « Stumpfer Turm » n’ayant eu le
temps de lui adresser qu’un coup d’œil furtif dans la
descente vers Hinzenrath. Et des bagnoles qui me collaient
toujours aux basques ! Vraiment pas marrant ! Voilà un Big
qui ne risque pas de sombrer dans les oubliettes.
Mon sentiment : joker !
Il me restait à boucler la boucle sur le chemin du retour.
La Principauté du G.D du Luxembourg était tout indiquée
d’autant plus qu’elle recense deux cols dans la région de la
Haute Alzette. Aussi, ai-je décrit un circuit au départ
d’Ettelbrück d’un peu plus de 60 bornes franchissant les
cols de Schaarfesuebel (368m) et de Lopert (334m). Le
premier est un
col de crête, qui se dédouble entre Blaschette (au sud) et
le col, si bien que la route (CR 101) entre le col et
Lintgen à l'ouest, descend tout 'abord, puis remonte sur le
flanc de la colline Blaschentderhecken (413m). Venant de
Fischbach , je me suis retrouvé à la bifurcation sans m’en
rendre compte. Autant vous dire que ça ne montait pas des
masses !
Quant au second, qui niche sur la nationale à la sortie de
Feulen vers Ettelbrück, bien que d’accès pentu, il n’a rien
d’un épouvantail. Mais « opgelet en niet gelachen »*,
ça ne veut pas dire charrette ! Le relief du Grand Duché
n’a rien d’une platitude ! Excepté le fond des vallées !
En fait, la traversée du pays d’est en ouest est faite d’une
succession de montagnes russes.
Aussi le manque de cols recensés est-il largement compensé
par des chemins de calvaire raides à souhait ! Parmi la
brochette de grimpettes que je me suis offerte au cours de
cette balade, il y a lieu d’en citer deux en particulier :
le Kreuzberg à Schieren et le Bierigberg à la sortie de
Beringen. Deux raidillons qui prennent leur origine dans la
vallée de l’Alzette. Des exemples typiques de ce que l’on
appelle communément des côtes à piétons. Par ailleurs,
quand on observe que la balade luxembourgeoise approchait
les 1000 m de dénivelée, il est aisé de conclure que ce
genre de partie de manivelles n’a rien de commun avec les
promenades le long des canaux. Et… les canaux au G.D du
Luxembourg, ils ne sont pas légion.
Conclusion ! Allez-y mollo chez nos voisins « Letzerburgers »
sinon gare aux dents ! Quant à mon
escapade, je la qualifierai : « Que du bonheur ! »
Automne 2005
* « attention et ravalez vos ricanements »
bruffaertsjo@skynet.be

|
|