|
Le Brevet
International du Grimpeur (BIG) se roule de mille façons en
cyclo et d’une façon en cycliste.
La plus simple des formules – celle qui est la plus courante
– consiste à localiser le pied de la côte, en grimper les
degrés et ensuite, en transmettre le résultat aux
responsables du challenge. Je ne m’étendrai pas sur ce
sujet qui n’a rien de sorcier, encore que…
Pour ma
part, ma curiosité s’était nichée pour une fois dans la
toponymie des BIGs inscrits dans des rondes
luxembourgeoises.
2 jours, 3 boucles, 4 centres de villégiature, 4 régions
vallonnées, 9 BIGs, 240 bornes et 3.500 mètres de
dénivellation ; voilà le programme que je me proposais à
détricoter pendant que ma tendre moitié se dorait sous les
« tropiques » crétois.
« Bamboesch »,
le premier des 9 BIGs, qui se présente dès la mise en route,
me pose problème quant à trouver le parcours préconisé par
le « Bigman ». Quand je vous disais !
N’ayant que trop touillé, l’ascension se fait par la
nationale qui monte à Bridel . Sept heures plus tard, je
me le farcirai via l’épouvantable versant « est » qui
soutient la comparaison avec n’importe quel thier ou tienne
de Wallonie. En vérité, la côte de Bamboesch eût mérité une
appellation plus idoine en rapport de sa déclivité. Die « Bamboeschere
Rampe » serait un bon compromis.
Vallée de l'Alzette
« Houwald »,
second de la liste, n’a rien à voir avec le Mont Houwald qui
domine la cité de Grevenmacher. A découvrir impérativement
au départ de Rollingen. Une fois sorti de la forêt, la
pente s’en va mourir dans les hautes terres qui sont
envahies par les champs de maïs. Le nom de « Houwaldhöhe »
me semble, ici, tout à fait de circonstance. Hélas, les
cartographes luxembourgeois ne brillent pas par leur
imagination ! La campagne est encore à l’état vierge. Les
routes le sont aussi. Casse-vitesse, ralentisseur ou autre
gendarme couché n’ont pas encore dénaturé le paysage. Il
est vrai que la circulation est quasi nulle sur les voies
secondaires.
Quant à la
montée de « Consdorf », entourée de
forêts de pins et de sapins et dominée de masses rocheuses,
elle n’a rien d’une redoute ni d’un épouvantail. Je la
qualifierais d’un simple « Leichtes Bergauf ».
Arrêtez-vous à hauteur de l’Auberge de la Gare, le paysage
en amont n’en vaut pas la chandelle. Mais comme nous sommes
dans un pays de moyenne montagne, il n’en finit jamais de
monter ou de descendre ! Qu’on se le dise !
Le point
culminant des « Gorges du Loup » se
situe au cœur de Berdorf, un village à forte concentration
hôtelière. L’accès naturel à ce haut lieu touristique prend
son origine à Echternach, sympathique capitale de la Petite
Suisse luxembourgeoise.
Spécialité de la station : sa célèbre procession dansante à
laquelle il m’arrive de faire allusion pour une affaire qui
progresse au train de sénateur.
De nature anticonformiste, j’ai préféré me taper le
raidillon de Kalkesbaach – ou le Kalkesbaachmauer –
qui tranche radicalement avec le pourcentage régulier de la
voie officielle bigéenne.
C’est une piste cyclable, protégée de la nationale par un
rideau de verdure,, qui amène le cyclo d’Echternach à
Moersdorf, un tournant où il est recommandé d'en avoir
encore sous la pédale. L’affrontement des heures
précédentes avec un inlassable toboggan commence à entamer
une partie des réserves. Heureusement l’ascension des « Eoliennes
du Patebierg » s’effectue
en deux phases : une « Steigung » n’ayant pas usurpé
les deux chevrons de Michelin. Ensuite, sur les hauts de
Givenich, une aire de repos qui tombe à-pic pour admirer à
loisir les éoliennes qui tournent au ralenti au-delà de
Mompach sur le Patebierg. Le relief en montagnes russes
condamne une fois de plus le cyclo à pédaler sans répit.
Les descentes deviennent de plus en plus courtes, les
montées de plus en plus raides. Alors quand on ferme la
boucle par le « Bamboeschere Rampe versant - est - »,
bonjour les dégâts !
|
|
|
|
Paysage entre Wark et l’Alzette |
|
|
|
|
|
|
|
La côte
« d’Eschdorf », BIG n°6 du périple,
située dans la Haute Sûre, est une réelle « Steile
Anhöhe » à négocier avec un brin d’humilité. Une levée
de 250 mètres sur quelque 3 bornes, qui sans être un
calvaire, requiert néanmoins de bonnes aptitudes à gravir
les pourcentages. Si parmi vous, il en est qui serait
décidé à lui rendre les honneurs du pied, qu’ils se
munissent d’une bombe « Reflex Spray » pour soulager leurs
mollets. On ne sait jamais ! A part cela, c’est clair
comme l’eau de la Sûre pour en repérer l’accès. Aussi pas
de quartier pour celui qui aura le toupet de se planter,
qu’on le jette dans une des oubliettes du château de
Schlossberg.
Après de moult voltes et contre voltes, les routes emmènent
le pèlerin par monts et par vaux « An dem
Munshausenhügel », une colline d’où l’on
découvre, à l’horizon, l’église abbatiale de Clervaux.
Malgré le replat dans Munshausen-bourg, c’est dans le
périmètre même de la localité qu’il m’a fallu solliciter le
petit effort « sup » de la part de mes lombaires. Etait-ce
dû au lit grand ouvert de la rue principale ? Ou à une
poussée de spleen imprimée par la vue du gîte d’étape ? Ou
à mon réveil en sursaut, au cœur de la nuit, dans la forêt
de Wiltz ? Mystère ? Quoi qu’il en soit, le « Munshausenhügel »
se décline en un juge de paix conciliant qui ne risque
guère de coincer un sujet qui ne pète pas la forme de sa
vie.
Le château de Vianden
Ourthal.
Une vallée où le campeur se pose en roi. Au contraire de ce
que l’on pourrait supposer, il se trouve que la vallée
verdoyante de l’Our n’est pas l’endroit idyllique pour se
refaire une santé . La route serpente à flanc de coteaux
entre les feuillus qui cachent souvent une rivière
paresseuse. Elle finit par échouer dans la cité médiévale
de Vianden ; une bourgade qui éveille l’intérêt de
l’historien, de l’écrivain et du bigéen.
L’historien sera attiré par le château des Comtes et la Tour
Yolande qui vit la fuite de la fille du comte. Elle
transforma ses draps en corde pour échapper aux affres du
mariage que son père lui imposait. Quant à l’écrivain, lui,
il ira à la rencontre d’un grand du siècle précédent. C’est
dans la maison en bordure du pont que Victor Hugo, pendant
son exil, batifola comme un petit fou avec Juliette Drouet
et d’autres encore. Pour ceux qui veulent en savoir
davantage à ce propos, je leur conseille de consulter les
annales du « Second Empire ».
La vallée, que la rivière a creusée au fil des siècles, est
profonde. Ca fait le bonheur du bigéen puisque ça grimpe
tout azimut. De plus, il se fait que le BIG n° 8 se trouve
justement au pied du mur du château. Un mur pavé de bonnes
intentions. Parce que le « Mont St Nicolas »
n’est une côte assassine. Le pourcentage régulier en fait
un BIG accessible à tout un chacun.
Du sommet
du Mont St Nicolas au pied du dernier BIG, la ferme de « Masseler »,
le profil du parcours est dément. On plonge de 100 mètres,
on remonte d’autant. Ensuite, on repique de 150 mètres, on
regrimpe du double. Un petit jeu sans fin pour
l’irréductible de la grimpette ! Pas de demi-mesure sur ces
petites routes qui traversent le Grand-Duché du Luxembourg
d’est en ouest. Ces casse-pattes usent le cyclo jusqu’au
trognon.
Bien heureux de m’être extrait indemne de ce guet-apens, je
pouvais aborder en toute quiétude l’ultime BIG. Le « Masselerecke »
me paraît la dénomination la plus appropriée en fonction de
la géomorphologie des lieux. Sur les hauteurs, à la
croisée des chemins, on ne se trouve pas sur un tertre, ni
un terne mais sur une selle ou un passage entre deux
sommets.
Autrement dit un col, comme qui dirait le coureur du Tour
de France qui mélange les pinceaux dès qu’il se met à
grimper les pentes d’une montagne. Puisque pour lui, un
col représente toujours un sommet ! ! !
Quant à moi, ma ronde des BIGs étant bouclée, je prends
congé des coreligionnaires bigéens en attendant de découvrir
d’autres sommets.
Août
99.
bruffaertsjo@skynet.be
|
|