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HAUTS LIEUX DU RONDE
C’était une journée d’automne, une de ces journées écrasées
de bruine, pendant laquelle il semble que le firmament
chargé d’un trop plein de grisaille, veuille se laisser
tomber sur la terre tant les épaules fléchissent sous son
poids. L’opacité de la brouillasse humiliait les couleurs
chatoyantes automnales des Ardennes Flamandes.
Jean-Marc s’était mis dans la tête de rouler dans la cour
des grands. Celle des randonneurs qui font du voyage en
montagne leur marotte. Un objectif permanent, un besoin
qu’ils compensent le restant de l’année par des projets. Par
des brevets, des randonnées officielles, des ascensions
ponctuelles. Par des sorties entre copains aussi. C’était le
cas en ce début de novembre.
La journée faillit mal commencer. Un coup de fil de Gégé
sauva les meubles. Jean-Marc, qui avait probablement prévu
ce petit contretemps, cachait dans sa musette son pardon
sous forme de deux gros saucissons d’Ardenne et deux brunes
onctueuses d’Achouffe.
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Renaix "Eglise St Hermès" |
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Au pied du Mont de la Cruche |
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En sa qualité d’invité d’honneur, Jean-Marc détermina
lui-même les ascensions qu’il comptait épingler à son
tableau de chasse. Son premier coup de cœur fut pour le mont
de la Cruche perché sur les hauteurs de Renaix. En mémoire
du « Crique ». Grimpé à une allure soutenue, le Kruisberg
fut prolongé par la montée de l’Hotond (150m) qui est le
point culminant de la Flandre orientale. Si l’horizon avait
été dégagé, Jean-Marc eût pu découvrir pas moins de 108
clochers différents. Hélas !
Au sommet, nous prîmes la direction de la « Ronde van
Vlaanderenstraat » où un hommage s’imposait au mémorial de
Karel Van Wijnendael, le père du Tour des Flandres. Ensuite,
ce fut la longue descente vers Berchem. Gégé, cyclant dans
son jardin, connaissait les lieux à la perfection. Comme
ceux-ci ne m’étaient pas tout à fait étrangers, nos chemins
se séparèrent ici pour la première fois. Gégé et Jean-Marc
prenaient l’assaut du Vieux Quaremont pendant que je
parvenais sans effort au sommet du Patersberg en contournant
le raidillon par Stookje,. De-ci, de-là, un saule aux vertes
feuilles oblongues tachées de noir interrompait une campagne
faite de cultures.
Jean-Marc se présenta le premier en haut du Patersberg, un
des redoutables juges de paix du Tour des Flandres. Il
faisait la course en tête, Gégé dans sa roue et moi…au
balcon. Ma condition physique était pour le moins émoussée.
Aussi était-il préférable de couper au court pour le « Pico
Bello » tandis que les deux grimpeurs filaient vers le
Koppenberg. L’estaminet du « Pico Bello », situé au
carrefour de Louise-Marie, convenait parfaitement comme
point de rencontre.
Le temps d’une chansonnette et l’équipe était à nouveau au
grand complet. A cette pause café, il ne fut question que de
vélo. Mais de quoi parler sinon de vélo quand un cyclo en
rencontre un autre.
Le Patersberg
Le Muziekberg n’opposa guère de résistance à notre ardeur et
le Fortuinberg, le versant opposé, nous amena à proximité de
l’auberge du « Fiertel » qui a adopté le patronyme de
l’Ommegang, un cortège folklorique qui sort le jour de la
Trinité.
Au bout de « Klein Frankrijk », la zone industrielle de
Renaix, la Flandre flirte avec la Walonnie : « Schoonboeke »
à droite, « Beaufaux » à gauche. La Terre d’Accueil ne nous
garda pas longtemps sur ses terres. Le temps d’un clin d’œil
au moulin des Cats et la route des Crêtes nous rendit au
carrefour sommital du Beau Site.
Une fois de plus, nos routes se divisèrent ; Jean-Marc et
Gégé exécutant une large boucle pour franchir le « Grinquier
», ensuite piquer sur Saint-Sauveur avant de remonter sur
les Monts par les pavés du Mont Saint-Laurent. Pour ma part,
j’optai pour une double ascension successive du dit mont.
Une alternative plus raide mais beaucoup plus directe. Qui,
au bout du compte, n’empêcha pas les lascars de me rattraper
et de me laisser proprement sur place lors de ma seconde
escalade à allure sénatoriale.
La balade sentait les écuries. L’espace d’une grimpette, le
souffle d’une descente et toute l’équipe se retrouva à
Germinal devant le domicile de Gégé.
La page cyclo était tournée ; l’épisode « commérages »
pouvait prendre son envol devant une table plein de bonnes
choses.
Automne 1992
bruffaertsjo@skynet.be
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